Dépression : reconnaître les symptômes et en sortir
Humeur terne, perte de tonus, irritation fréquente, peur du lendemain, crises de larmes, remises en cause, tristesse permanente, troubles du sommeil... Si de tels symptômes s'installent et persistent, vous risquez fort de commencer une dépression. Comment lutter contre la dépression ?
En France, selon l'Inserm, la dépression concerne une personne sur cinq, deux fois plus les femmes que les hommes. A tel point qu'avec l'anxiété, elle est la plus répandue des troubles de l'humeur. La dépression est aussi le trouble psychologique qui a connu le plus grand boom ces dernières années, au point que la consommation d'antidépresseurs a explosé. Heureusement, de nombreuses autres solutions existent. Identifier les symptômes de la dépression, connaître tous ses aspects, choisir la thérapie la plus adaptée : ce sont les meilleurs moyens de s'en sortir !
Définition : qu'est ce que la dépression ?
L'INPES indique que 19 % des Français entre 18 et 85 ans, soit près de 8 millions de personnes, ont vécu ou vivront une dépression au cours de leur vie. Selon l'Institut Nationale de Veille Sanitaire (InVS), après une stabilité observée entre 2005 et 2010, la prévalence de la dépression a augmenté de 1,8 points sur la période 2010-2017. Cette augmentation concerne davantage les femmes (+3 points), les personnes entre 35-44 ans (+4 points) et les chômeurs (+5 points).
La dépression est un trouble de l'humeur. Il se caractérise par une profonde tristesse, un désespoir, un manque de désir de vivre, un repli sur soi, une perte d'intérêts et de motivation pour les activités de tous les jours, un changement de comportement et un ralentissement psychique et moteur qui peuvent conduire dans les cas les plus extrêmes au suicide. La vraie dépression, aussi appelée épisode dépressif majeur, n'est pas un simple vague-à-l'âme de quelques jours. Elle se traduit par une série précise de symptômes, se manifestant sur une durée minimale de deux semaines et qui peut perdurer plusieurs semaines, mois voire années.
Dépression ou déprime : les différences ?
Beaucoup de personnes connaissent des épisodes dépressifs plus courts, liés à des facteurs déclenchants comme la mauvaise saison, la mort d'un proche ou encore un baby blues. Mais le mot "dépression" est entré dans le langage courant et ne désigne pas toujours à bon escient le trouble dépressif. Par exemple, la tristesse et l'abattement consécutifs à un deuil ne sont pas toujours dépressifs, même s'ils durent plusieurs semaines. De même, des sentiments passagers de mélancolie et des pertes d'enthousiasme ne forment pas nécessairement une dépression, mais plutôt une simple phase de déprime appelée à disparaître spontanément.
Les types de dépression
Etat dépressif
La dépression est un trouble psychologique qui se caractérise par un état dépressif caractéristique. Celui-ci se traduit par une baisse de l'humeur, un désintérêt pour des activités habituellement sources de plaisir, un sentiment de culpabilité et/ou une baisse de l'estime de soi. Un état dépressif peut également avoir un retentissement sur le sommeil et l'alimentation et donner lieu à des idées suicidaires. "Dans 60 % des cas, les états dépressifs sont traités par la prise d'antidépresseurs", précise le Dr Patrick Lemoine, psychiatre à Lyon. Une psychothérapie accompagne souvent le traitement médicamenteux.
Dépression chronique
Quand la dépression se poursuit pendant au moins deux ans, on parle de dépression chronique. Si elle est soignée par des antidépresseurs et une psychothérapie, parfois une hospitalisation en milieu psychiatrique s'avère nécessaire.
Dépression réactionnelle
La dépression réactionnelle est une forme de dépression causée par un événement marquant ou une pression psychique excessive. Ce peut être consécutif à un deuil, un accident, un problème professionnel… ou même parfois des événements pouvant paraître dérisoires. Les personnes en dépression réactionnelle sont sujettes aux pleurs intempestifs, à des troubles du sommeil et présentent les symptômes d'une dépression classique : tristesse, pertes d'intérêt et de motivation, repli sur soi, ralentissement psychique et moteur, modifications de comportement. La dépression réactionnelle est généralement traitée par antidépresseurs, complétés par une prise en charge psychothérapeutique.
Dépression post-partum
Si de nombreuses mamans peuvent connaître un baby blues après l'accouchement (jusqu'à 70 % peuvent être concernées), il n'est pas à confondre avec la dépression post-partum. "Dans le premier cas, les jeunes mères sont tristes, ont des crises de larmes brusques, elles sont irritables, insomniaques parfois et anxieuses, des symptômes qui apparaissent entre un et trois jours après la naissance et disparaissent spontanément au bout de deux semaines", explique le Dr Lemoine. Dans le cas d'une dépression post-partum, les symptômes sont une tristesse profonde et durable, un désintérêt quasi total pour les activités du quotidien, des insomnies, de l'irritabilité et de l'anxiété, une fatigue permanente ainsi que des troubles de l'interaction entre la mère et l'enfant ". Elle concerne 10 à 15 % des mères, et se manifeste environ 4 à 6 semaines après l'accouchement. "Une psychothérapie associée à la prise d'antidépresseurs sera le traitement de base. Au besoin, une hospitalisation dans une unité parents-enfants pourra être proposée", précise le Dr Lemoine.
Dépression saisonnière
Cet épisode dépressif, qui touche plus souvent les femmes et les enfants, survient généralement le à l'automne ou au début de l'hiver et s'installe jusqu'au printemps. Elle est provoquée par une baisse de la lumière naturelle. "Les symptômes sont ceux d'un épisode dépressif : tristesse permanente, perte d'intérêt pour les activités de tous les jours, la boulimie sucrée, l'hypersomnie, la somnolence et une fatigue intense dès le réveil, explique le Dr. Lemoine. A ces principaux changements, peut également s'associer une baisse de libido, une prise de poids, une irritabilité et une dévalorisation de soi". Il existe une thérapie spécifique pour l'enrayer : la luminothérapie. "Elle consiste à s'exposer à une forte lumière, proche de celle du soleil, précise notre expert. Les séances durent une demi-heure. Mais des lampes de luminothérapies sont également disponibles dans le commerce". Des séances de psychothérapie peuvent compléter le protocole de soins.
Causes et facteurs de risques
La dépression est-elle inscrite dans nos gènes ? Il existe des facteurs de risques héréditaires, mais plusieurs facteurs sont associés dans le déclenchement d'un épisode dépressif. La dépression court parfois dans les familles. Selon l'Inserm, un individu dont l'un des parents fait une dépression a deux à quatre fois plus de risque d'être lui-même dépressif au cours de sa vie. La probabilité d'une future dépression est plus élevée encore si l'un de ses parents a développé un premier épisode dépressif avant l'âge de vingt ans.
La dépression touche les hommes comme les femmes, quels que soient leur âge, leur milieu ou leur origine. On note cependant plusieurs traits caractéristiques du trouble dans la population.
Genre, origine, milieu
Le sexe-ratio de la dépression est disproportionné : les femmes sont deux fois souvent touchées que les hommes. Avant l''adolescence le sexe-ratio est équilibré, avec même un léger désavantage pour les garçons. On ne relève en revanche aucune différence notable entre les origines ethniques des individus. De même, les groupes socio-économiques sont tous atteints dans des proportions à peu près semblables. La dépression est un peu plus fréquente chez les personnes à bas revenus, les troubles bipolaires chez les personnes à hauts revenus.
Âge
En moyenne, le premier épisode dépressif majeur se situe autour de 35 ans. Le trouble peut néanmoins se déclencher dès l'enfance ou l'adolescence.
Il existe un premier pic de fréquence de la dépression à l'adolescence, sans doute en raison des modifications hormonales qui se répercutent sur le fonctionnement cérébral.
Dans 10% des cas seulement, la première dépression apparaît après soixante ans. Chez les personnes âgées, le diagnostic n'est pas toujours aisé, car l'apathie et les déficits cognitifs peuvent être confondus avec des effets courants du vieillissement cérébromoteur.
Hérédité
Les études de jumeaux comparent les vrais jumeaux monozygotes (100% de gènes en commun) et les faux jumeaux dizygotes (50% de gènes partagés). Elles montrent en moyenne que 40% environ des vrais jumeaux sont concordants pour le trouble alors que 10% seulement des faux jumeaux le sont aussi. L'héritabilité de la dépression est estimée à 35-55% selon les études. Cela signifie que les gènes expliquent pour moitié environ la différence entre les personnes qui développeront une dépression et celles qui seront indemnes.
Génétique
Grâce aux progrès de la génomique, on peut depuis quelques années rechercher les variations génétiques présentes dans la population dépressive. La dépression est sans doute favorisée par l'effet additif de nombreux gènes de susceptibilité. Les liens les plus robustes ont été trouvés avec le gène 5-HTTLPR, lié au transport de la sérotonine dans le cerveau Identifier les gènes permet aux chercheurs de comprendre les mécanismes intimes de la dépression et de travailler sur la mise au point de nouveaux traitements.
Quels sont les signes d'une dépression ?
Selon l'OMS, neuf symptômes expriment la dépression. Ils sont variables d'un individu à l'autre. Parmi eux : une humeur triste exprimée presque tous les jours, souvent plus prononcée le matin que le soir, aboutissant parfois à des crises de larmes sans motivation ; une perte d'intérêts pour les activités habituelles, diminution générale de la libido ; dévalorisation de soi, culpabilisation vis-à-vis de l'entourage, doute systématique et exagéré sur la valeur de ses actes ou de ses idées ; pensées récurrentes de mort et idée suicidaire ; ralentissement psychomoteur se traduisant par des difficultés de concentration, des baisses de vigilance, des trous de mémoire, des difficultés à suivre ou à participer à une conversation ; indécision face aux choix les plus simples ; variation importante de poids (5% de la masse corporelle) en perte ou en gain ; trouble du sommeil se manifestant par une insomnie (difficulté d'endormissement, réveil nocturne) ou une hypersomnie (envie fréquente de dormir, volonté consciente ou inconsciente de trouver refuge dans le sommeil) ; sensation de fatigue dès le matin. Pour les patients qui présentent entre 5 et 7 symptômes, la dépression est considérée comme légère à modérée. Au-delà de 8, elle est dite sévère.
Prévalence
Comme le stress, la dépression est souvent qualifiée de "mal du siècle". Il s'agit du trouble de l'humeur le plus répandu dans la population : il touche 13 % des femmes et 6,4 % des hommes, selon l'Invs. Quant à la probabilité de développer une dépression au cours de l'existence, elle s'élève à 10% chez les hommes et 20% chez les femmes. Le risque est donc élevé : un homme sur dix et une femme sur cinq sont ou seront donc sujets à la dépression. Plusieurs millions de familles sont concernées en France.
Comment sortir de la dépression ?
Avec la psychothérapie
Travailler sur soi permet d'identifier les causes de la maladie, d'accompagner la guérison et d'éviter les rechutes. " De nombreuses études ont prouvé l'efficacité de cette thérapie, assure le Dr. Lemoine. Elle apporte une écoute bienveillante, permet de mettre des mots sur la douleur et de lutter contre les pensées négatives et auto-dévalorisantes ". Les séances doivent être régulières, de l'ordre d'une à deux séances par semaine pendant plusieurs mois selon l'importance des symptômes.
Avec des antidépresseurs
Il s'agit de psychotropes sont le rôle est de faire disparaître les troubles de l'humeur. Dans le cas d'une dépression majeure, leur prise peut être recommandée. "Ils apportent un soulagement au bout de deux à trois semaines de prise, précise le Dr. Lemoine. Mais parce qu'ils ont des effets secondaires importants (troubles du rythme cardiaque, troubles sexuels, vertiges…), ils ne sont prescrits que pour une période, n'excédant pas 4 à 6 mois".
Avec des remèdes naturels
Les conseils ci-dessous ne remplacent pas l'avis d'un médecin ou d'un pharmacien. Si les symptômes perdurent ou s'ils s'aggravent, il faut alors consulter rapidement son médecin traitant. Le Millepertuis est un antidépresseur naturel, utilisé dans les cas de fatigue chronique et comme régulateur d'humeur. Plusieurs études en placebo double-aveugle comparent même le millepertuis à certains antidépresseurs synthétiques, les effets indésirables en moins. La rhodiole favorise la concentration. Elle agit sur la fatigue cérébrale en stimulant les fonctions cognitives et sur la fatigue physique en améliorant le tonus. Elle atténue également l'anxiété et la dépression légère, lutte contre la fatigue générée par le stress.
Une étude réalisée en 2005 a comparé les effets du safran au Prozac et en a déduit qu'elle était tout aussi efficace, les effets secondaires en moins ! La raison ? Elle possède deux substances, le safranal et la crocine, qui stimuleraient la production de sérotonine, un neurotransmetteur dont le rôle est d'équilibrer le système émotionnel. Une demi-pincée suffit pour bénéficier de ses effets antidépresseurs.
Evolution d'une dépression
Une dépression peut disparaître spontanément en 6 et 12 mois. Mais elle annonce souvent une récidive. Selon l'Inserm, celle-ci survient dans les 5 années suivantes dans 50 à 80 % des cas. Le risque s'accroît avec la répétition des épisodes : 70% des personnes ayant connu deux périodes de dépression en présenteront une troisième, 90% de ceux qui en ont subi trois en affronteront une quatrième. Or, plus les récidives sont nombreuses, plus la dépression est sévère.
Au total, on estime que la moyenne des épisodes dépressifs majeurs au cours d'une existence se situe autour de 5. Mais il existe des variations considérables entre les individus. Les uns ne développeront qu'une ou deux fois le trouble : les autres vivront avec lui leur vie entière. On constate ainsi une moitié de guérison définitive et un tiers de guérisons partielles. Pour une personne sur cinq, l'évolution de la dépression sera chronique.
Dépression et suicide : le risque majeur
Le principal risque d'une dépression non traitée est le suicide. Selon un rapport de l'Académie de Médecine, le risque de suicide est multiplié par 21 en cas de dépression. Au final, entre 5 et 20 % des patients commettent une tentative ou adoptent un comportement suicidaire (prise de risque, autodestruction, mutilation…). Le risque de mortalité est particulièrement élevé lorsqu'il existe des antécédents dans la vie du patient ou dans la famille, lorsque la dépression a été déclenchée par un deuil ou une séparation, lorsque le dépressif est en situation de dépendance toxicologique (alcoolisme, drogue).
Prévenir la dépression
De nombreuses solutions existent pour se sentir mieux.
Adopter un mode de vie sain : pratiquer un sport, une activité de relaxation (méditation, yoga…), respecter ses cycles de sommeil et manger de façon équilibrée peuvent être un premier rempart contre la dépression.
Sortir tous les jours, afin de vous exposer à la lumière naturelle du jour
Avoir une vie sociale riche. Que ce soit entre amis ou en famille, les liens sociaux sont très importants pur la bonne santé mentale.
Consulter dès les premiers signes de tristesse. Prenez rendez vous chez un psychologue, un psychothérapeute ou un psychanalyste afin de désamorcer rapidement les premiers symptômes. Le bouche-à-oreille vous permettra de trouver un bon praticien.
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